Cher Wajdi...
Je me permets de te tutoyer parce que tu m’es rentré sous la peau, avec tes mots. J’ai été complètement bouleversée par Incendies, que j’ai vue au TNM l’automne dernier. Et puis je viens de terminer de lire Forêts. Je compte les jours qui me séparent de la première, en janvier. Je m’offre toute entière pour recevoir cette pièce en pleine gueule, en plein cœur.
Comment tu fais pour raconter la guerre, l’horreur, et en même temps semer des graines de bonheur qui finissent par fleurir? Comment tu fais pour imbriquer tous ces destins, pour tisser de telles toiles humaines? Le sens se dépose en couches sur la beauté des mots, leur mettant le feu, faisant naître d’autres dimensions. Je te lis, je t’écoute, et je suis bouche bée d’admiration. Je voudrais écrire comme toi, parce que tu sais aller à l’essentiel sans jamais le nommer.
Je parle de tes mots, mais ton langage me touche aussi. J’ai vu deux fois ta mise en scène des Trois sœurs, de Tchekhov. C’était tellement jubilatoire, tellement intense! Le malaise des trois femmes confinées à la campagne, on le ressentait à une extrême puissance. Tu sais évoquer l’invisible, créer des mondes à partir du rien. C’est magnifique.
Je n’ai pas tout vu, je n’ai pas tout lu ce qui porte ta signature. Mais alors que je porte en moi l’histoire de Loup et de ses Forêts, je sais que je te retrouverai quelque part, dans une salle sombre ou dans un livre…