Dis-moi c'est quoi ta toune? (tell me what is your song)
Ça fait longtemps que ça me chicote. Je remarque une tendance qui me met éminemment mal à l'aise, surtout dans les séries télé comme Les Invincibles, Fortier et Sophie Paquin, puis hier soir, le film Roméo et Juliette a fait déborder mon vase.
(Je ne ferai pas ici de critique de ce film tellement décrié... Ce n'est effectivement pas un très grand film, mais c'est à mon sens beaucoup moins pire qu'on le dit. L'histoire d'amour entre les deux ados est plutôt touchante...)
Ce dont je parle, c'est de la présence envahissante de chansons en anglais dans des oeuvres francophones. J'ai l'impression de revivre mon adolescence, alors que notre prof d'art dramatique nous expliquait qu'une chanson en français serait tellement plus percutante dans nos productions, nous qui ne jurions que par les groupes à la mode à l'époque... qui chantaient évidemment en anglais.
Je ne sais pas trop comment nommer mon malaise. Je ne veux pas dénigrer la qualité ni le succès des artistes anglophones d'ici (puisqu'au moins, ces chansons en anglais viennent d'artistes québécois, en majorité). Je salue bien bas les Arcade Fire, Patrick Watson, Simple Plan qui connaissent un rayonnement mérité. Ils ont leur place dans ma discothèque et je les apprécie.
Mais je n'ai pas l'impression que le français n'est plus menacé. Je trouve que ces films et ces séries télé gagneraient à faire une place à des chansons en français, alors qu'ils soignent la langue que leurs comédiens utilisent. À l'image d'un Yves Pelletier qui a fait appel à Dumas et à Carl Bastien pour signer la trame sonore de son film Les Aimants, pourquoi ne pas se tourner vers des Yann Perreau, Pierre Lapointe et tellement d'autres pour habiller musicalement des oeuvres d'ici?
En plus de donner plus d'impact aux films et aux séries en français, la présence de chansons en français dans ces oeuvres à grande diffusion est bien sûr un plus pour ces artistes musicaux. Alors que la plupart d'entre eux sont boudés par les radios commerciales, une visibilité plus grande n'est pas à dénigrer. On n'a qu'à penser à ce qu'ont fait les "pa-pa-pa-paaa-pa!" de la chanson "Tu m'aimes ou tu mens" pour la carrière de Dumas!
En fait, quand je vois un film comme Roméo et Juliette, qui contient beaucoup de musique et pas une seule chanson en français, je me dis que la chanson québécoise francophone n'est pas valorisée. Et c'est bien dommage car, surtout pour un film comme celui-ci que beaucoup d'ados verront, c'était une bien belle occasion d'ouvrir une porte sur la richesse de notre patrimoine culturel... Même chose pour la chanson du générique des Invincibles, que Radio-Canada fait passer en boucle depuis quelques semaines.
J'écris tout ça et je suis sûre que je susciterai des réactions. Car il est de bon ton ces temps-ci d'afficher sa préférence pour la nouvelle scène anglophone montréalaise. Mais faut-il le faire au détriment de tout un pan de la chanson qui continue de s'enrichir? Il me semble qu'il devrait y avoir un juste milieu...